L’initié et génial visionnaire que fut Joséphin Péladan (1858-1918), fondateur de l’Ordre de la Rose-Croix Catholique du Temple et du Graal et fondateur des célèbres Salons de la Rose-Croix connut, à l’âge de vingt-six ans, une célébrité immédiate avec la publication de son premier livre, Le Vice suprême. Sa vie romanesque s’inscrivit paradoxalement entre occultisme, symbolisme, décadentisme, catholicisme et son action hautement singulière au sein des milieux littéraires, artistiques et initiatiques de la Belle Époque reste encore aujourd’hui, au regard de la critique contemporaine, tout à fait déterminante. Pourtant, certains aspects de sa personnalité complexe demeurent encore bien mal compris. Contre toute attente, dans une lettre datée du 7 février 1888, retrouvée récemment en archives privées, le Sâr Péladan se définit lui-même comme un « kabbaliste chrétien », autant dire que l’approche biographique et contextuelle de cette étude historique sur les courants initiatiques rosicruciens autour du Sâr Péladan, menée avec assurance par Arnaud de l’Estoile, écrivain reconnu et fin connaisseur de cette période qu’il dépeint maintenant, ouvrage après ouvrage, avec la précision historique et la qualité d’un chercheur attentif, mérite une attention toute particulière. « Présenter Joséphin Péladan en quelques lignes, fut-ce en de nombreuses pages, relève de la gageure… » nous confie dans sa postface à l’ouvrage Jean-Pierre Bonnerot, Président de la Société Joséphin Péladan, c’est néanmoins ce que réussit parfaitement l’auteur, à travers ce voyage extraordinaire dans une époque où l’on retrouvera, entre autres, la fameuse « Guerre des deux Roses » qui vit une opposition farouche entre Stanislas de Guaita et Joséphin Péladan, notamment. À l’aurore de son parcours, l’œuvre de Péladan tomba dans un oubli immérité, c’est ce que nous rappelle ce livre d’Arnaud de l’Estoile, qui tend patiemment, avec une érudition sans faille et avec la présentation en fac-similé de vingt-quatre lettres inédites de Joséphin Péladan, à retisser les fils d’une Rose-Croix éternelle et parfaitement vivante.
>[Les éditions Arqa]
En illustration : Lettre inédite de Joséphin Péladan du 21 avril 1885 – Cette lettre de Péladan du 21 avril 1885, au destinataire inconnu, est à l’en-tête de sa revue « des livres et des estampes ». Celle-ci, lancée en même temps que Le Vice suprême, et qu’il avait voulu « complète, compétente et violente » n’eut que quatre numéros, parus d’octobre 1884 à janvier 1885. Il le confirme dans cette correspondance : « Ma revue est morte à son quatrième numéro » et photographie réunissant Papus, Péladan, Guaita au 1er rang, Antoine de La Rochefoucauld au 2e rang au centre. (DR.).