Tu m’as donné une fleur bleuâtre
Couleur de conte de fée
Je l’ai emportée en voyage
Et je l’ai laissé tomber dans la mer
Rends-moi cette fleur
M’as tu dis un jour,
Je ne cesse pas de penser à elle,
Elle renfermait le secret de tous les amours.
– Il ne faut pas donner de choses si précieuses !
J’ai laissé tomber la fleur dans la mer.
Elle est peut-être en Chine maintenant,
Peut-être plus loin, je ne sais où…
« Ah les hommes sont tous les mêmes !
Ils ne font pas cas de la beauté
Et de cette ineffable présence
Que l’on cache au fond d’une fleur. »
Mais plus tard, quand je serais mort,
Tu t’éveilleras un matin d’été
Et tu verras sur la fenêtre
La fleur couleur de conte de fée.
Je l’aurai cherchée plus loin que la Chine,
Sur les grandes plages de sable amer,
Et j’en aurai fait avec la force de l’âme
Une fleur éternelle, une fleur divine
Et tu diras : « Les hommes sont tous les mêmes !
Ce n’est pas la peine de mourir
Pour ignorer que la seule vraie beauté
Est celle qui n’est pas éternelle.
Cette fleur serait bien plus belle
Salie avec un peu de sable chinois.
Ah ! s’il y avait au moins dans son calice
Une petite araignée de mer. »
Maurice Magre. – Le Parc des Rossignols, Fasquelle ed. 1940.