En novembre 1967 Rennes-le-Château, minuscule village perdu de la haute vallée de l’Aude, accédait brutalement à la notoriété, d’abord nationale puis bientôt internationale, par le miracle d’un seul livre, « L’or de Rennes » , d’un journaliste nommé Gérard de Sède. En quelques éditions et de très nombreux retirages, cet ouvrage d’une plume aussi talentueuse qu’efficace allait fixer pour les décennies à venir la légende de l’abbé Bérenger Saunière, le « curé aux milliards » qui se serait enrichi à la charnière des XIXe et XXe siècles par la découverte fortuite d’un inépuisable trésor…
Il fallut des années ensuite avant de découvrir que de Sède n’avait été en façade que le porte plume et le très habile ordonnateur d’un substrat littéraire hétéroclite fourni sous le couvert par un duo d’aventuriers machiavéliques, Pierre Plantard et Philippe de Cherisey, lesquels semblaient dans l’ombre s’être donnés pour seul but de doter Pierre Plantard de quartiers de noblesse aussi illusoires que préfabriqués en prenant en otage près de mille ans de l’histoire de France, et en les faisant glisser sous la férule occulte d’un très vaporeux « Prieuré de Sion », ordre soi-disant chevaleresque chargé à travers les siècles de pérenniser la lignée royale -excusez du peu – de la famille Plantard de Saint-Clair.
Mais en cette fin des années 1960, l’affaire du trésor de Rennes-le-Château était lancée et rien ni personne ne pouvait plus l’arrêter…
Ce furent donc bien vite des centaines de livres écrits sur le sujet, des films, des émissions de télévision avec, si ce n’est au mieux une redite perpétuelle des mêmes poncifs issus directement de « L’or de Rennes », et au pire une surenchère de thèses et de foutaises aussi surréalistes qu’alambiquées dont l’énumération aurait tout d’un inventaire ésotérique à la Prévert.
Mais jusqu’au début des années 2000, les recherches officielles -entendez par là celles qui furent publiées- il faut bien le dire, piétinèrent et ne menèrent pas à grand chose. Chez certains impatients nouvellement débarqués dans cette énigme, et dont Internet est hélas un grand pourvoyeur, l’incompréhension puis l’aigreur succédèrent vite à l’enthousiasme bouillonnant du début. La tentation alors de réfuter tout en bloc et de salir ce qui avait été auparavant adoré devint un exutoire facile pour beaucoup de ces esprits faibles et peu capables de relever les extraordinaires challenges intellectuels qu’impose cette affaire hors du commun.
De déceptions en abandons de recherches, par paresse ou manque d’intelligence, beaucoup prirent donc le parti extrêmement simpliste et confortable de condamner péremptoirement l’affaire des deux Rennes en la qualifiant avec force d’escroquerie mise en place dans les années 1960 par le trio Plantard, de Cherisey et de Sède.
Très sottement, chez eux une habitude, ils venaient tout simplement de jeter le bébé avec l’eau du bain !
Pour répondre à ces handicapés du raisonnement et de l’analyse, les quelques pages qui suivent vont définitivement démontrer que derrière le fatras habilement romancé par Gérard de Sède se profilent des vérités beaucoup plus anciennes dont le trio dont nous venons de parler n’aura été que la courroie de transmission involontaire, en publiant en toute méconnaissance de cause certains éléments tout à fait authentiques et indiscutables, bien que parfois légèrement dévoyés …
… 3 dalles et 2 parchemins, dont une lecture et une compréhension tout à fait inédite vont implacablement renvoyer les mécréants négationnistes de l’affaire de Rennes au bonnet d’âne tant mérité de leur enfance (…).
(Extrait de) : Didier Hericart de Thury – Franck Daffos – « L’OR de RENNES » – Quand Poussin et Teniers donnent la clef de Rennes-le-Château. Du codex Bezae à la vraie langue celtique, de la tombe de Madame de Blanchefort au petit parchemin, les Bergers d’Arcadie et la tentation de saint Antoine. – Les Chroniques de Mars numéro 5, juillet 2011.
En illustration : « L’OR de Rennes », de Gérard de Sède, édition originale, et Franck Daffos, à Marseille, aux éditions Arqa, le 24 juin 2011, présentant une reproduction à l’échelle 1, du saint Antoine, de David Teniers le jeune. (Photo Arcadia ©).