Nos précédents textes nous ont permis de mieux définir les quatre divinités suivantes ; Vénus, Mercure, Mars et Jupiter et de corriger des définitions tout à fait insuffisantes au regard de l’Astrologie. Selon nous, en effet, la mythologie est indissociable d’un regard anthropocentrique sur le monde.
Rappelons les rapports dieux planètes-saisons :
Printemps : Vénus
Eté : Mercure
Automne : Mars
Hiver : Jupiter.
Ces quatre planètes ne nous intéressent pas du point de vue de leur position dans le zodiaque (ni en maisons, ni en aspects). Elles servent à déterminer les étapes successives de tout cycle à diviser en quatre parties égales. En revanche, Saturne est bel et bien appréhendé du point de vue de son mouvement réel et symboliquement se conjoint avec ces quatre planètes quand il pénètre dans leurs territoires respectifs. Il assume analogiquement le rôle du couple Soleil-Lune mais à une autre échelle (un jour pour un an, ce qu’avait pressenti Dane Rudhyar, 28 jours pour la lunaison).
Saturne voit ainsi son cycle global divisé en 4 périodes de sept ans, du fait de ses « vraies » conjonctions avec les quatre étoiles fixes royales, formant un carré dans le ciel. Chaque période de sept ans, environ, est divisée en 4 phases correspondant aux quatre planètes virtuelles Vénus, Mercure, Mars, Jupiter. Cela correspond à des octiles de 22°30. (x4=90). Il lui faut 21 mois environ pour parcourir 22°30. On peut donc dire que très grossièrement, il faut un mois à Saturne pur franchir un degré d’arc et approximativement 84 mois pour couvrir 90°. 84 correspond à la révolution d’Uranus, astre le plus éloigné visible à l’œil nu (84 ans).
Notre travail de recherche comporte deux volets : d’une part, la mise en place du modèle saturnien, à partir d’une matrice soli-lunaire (7 jours/7 ans) et d’autre part, la détermination de la nature des phases successives en recourant aux données mythologiques conservées dans la tradition astronomique. L’Astrologie que nous présentons se veut donc extrêmement ancienne, du fait qu’elle ne tient pas compte de planètes invisibles à l’œil nu qui ne furent découvertes qu’à partir du XIXe siècle (Cérès, Neptune, Pluton etc.) et au plus tôt du XVIIe siècle (lunette de Galilée qui aurait localisé Neptune).
Nos dernières recherches auront consisté à traduire ce que nous entendions empiriquement par phase bleue et phase rouge en un langage mythologique préexistant selon la séquence suivante : Vénus-Mercure-Mars-Jupiter, à partir de la conjonction de Saturne avec une des quatre étoiles fixes royales, à savoir les deux planètes « intérieures « suivies des deux planètes « extérieures » par rapport au cycle annuel…Vénus et Mercure parcourent le zodiaque en un an, donc au même rythme annuel, ce qui montre bien que ce n’ est pas leur cyclicité qui est signifiante mais bien leur nom, d’où un certain nominalisme planétaire faisant pendant à un « réalisme » planétaire.
Nous avons déjà atteint certains résultats à propos de Mercure que nous résumons :
– Mercure doit reprendre sa place face à Jupiter, laquelle place lui avait été transférée à Saturne/
– Mercure n’est pas, comme on lit trop souvent, l’intelligence car on ne voit pas en quoi ce mot clef pourrait avoir une quelconque valeur prévisionnelle, de même que Mars n’est pas davantage l’énergie, ce qui est également fort peu utilisable pour décrire une période de temps. Peut être que cela fait sens pour l’astropsychologie de nous dire quelle est la forme d’intelligence du né, par l’étude de son Mercure, mais comment décrire une phase mercurienne, quelle que soit les critères utilisés pour décrire un tel type de phase ?
C’est ainsi que nous pensons avoir fait avancer le schmilblick en associant Mercure à l’Eté et à la moisson, ce qui est d’ailleurs lié à la Vierge et à l’épi. Mais là encore, qu’est ce que ce signe nous dit sur le plan prédictif ? Et tout est ainsi à l’avenant.
Il nous est apparu que Mercure devait signifier prioritairement, en astrologie, une période d’appauvrissement. (les sept vaches maigres) et c’est le dieu des voleurs qui est l’attribut mercurien que nous privilégierons. Nous avons bâti notre argumentation autour de l’idée de glane. Ce sont les pauvres qui glanent, ce qui est une forme de mendicité comme de récupérer des produits jetés dans les poubelles ou qui restent sur la voie publique à la fin des marchés. Pour nous Mercure sera celui qui glane, qui accommode astucieusement, avec ingéniosité, les restes. Cela parle autrement plus nettement que la seule notion d’intelligence à propos de Mercure.
Si l’on considère la période Printemps-Eté, que nous associons respectivement à Vénus (Taureau) et à Mercure (Vierge) – nous ne reviendrons pas ici sur le rapprochement que nous effectuons entre Vénus et la symbolique géminienne- nous avons un temps vénusien suivi d’un temps mercurien que l’on retrouve en fait chez Saturne, tel que le décrivent les astrologues, synonyme de restriction. Mais en fait, cette notion est d’abord mercurienne. Que faire en période de pénurie ?
La phase « bleue » (en Astro double carré) comporte donc un temps vénusien et un temps mercuro-saturnien (Printemps-Eté) tandis que la phase « rouge » comporte un temps martien suivi d’un temps jupitérien. (Automne-Hiver).
Si l’on s’en tient à une certaine tradition qui considère Jupiter et Vénus comme des astres bénéfiques, et Saturne(Mercure) —Mars comme des astres apportant une certaine infortune, l’on observera que la fin de la phase rouge et le début de la phase bleue sont assez euphorisantes alors que la fin de la phase bleue et le début de la phase rouge se vivent comme assez pénibles. Ce qui nous renvoie aux sept années « grasses » suivis de sept ans ‘maigres »/ (songe des vaches, de Pharaon, interprété par Joseph l’Hébreu)
Contraste donc assez remarquable entre Vénus et Mercure. La phase bleue débute dans une certaine opulence largement partagée mais peu à peu, au-delà d’un certain seuil, au bout de 21 mois environ (28/16), les plus pauvres ne peuvent plus suivre sinon au moyen d’expédients mercuriens.
De là, nous passons à Mars qui succède à Mercure et qui va contraindre à des coupes sévères, à une austérité. Peu à peu, on trouve un nouvel équilibre avec Jupiter mais surtout au profit des plus forts et des plus riches. De là on continue sur Vénus par un certain partage des richesses et le cycle se prolonge indéfiniment.
Si l’on transpose ces quatre demi-phases, totalisant sept ans au niveau de l’astrologie mondiale, nous voyons que nous sommes actuellement entre Mercure/Saturne et Mars, ce qui n’est pas follement gai. On est à l’opposé du « demain on rase gratis » de Vénus et il faudra encore quelque temps pour accéder à une sous phase de 21 mois jupitérienne.
On aura compris que ces quatre planétes « nominales » résument la dynamique propre à chacun des quatre saisons. Les trois signes zodiacaux propre à chaque saison ne font qu’illustrer la dominante de l’une des quatre planétes nominales. On ne s’y référera qu’accessoirement en raison de la dégradation du dit symbolisme zodiacal. En revanche, nous proposons de substituer au dit symbolisme les 12 représentations traditionnelles des 12 mois de l’année telles qu’elles ont été conservées dans la décoration des catédrales, dans l’iconographie des almanachs, des Livres d’Heures, dans le tarot et dans diverses légendes mythologiques.(Travaux d’Hercule etc). Un bon exemple que nous conseillons est celui des Très Riches Heures du Duc de Berry. (Musée Condé, Chantilly, France) que l’on trouve très facilement sur Internet. Il est remarquable que cette source iconographique ait été très largement ignorée ou négligée sinon refoulée par les astrologues du XXe siècle alors mêmes que ceux-ci se revendiquaient comme tropicalistes et affirmaient que le zodiaque s’originait dans le cycle des saisons. Ils ont cru pouvoir donner le change en plaquant sur le zodiaque un commentaire faisant presque totalement abstraction du symbolisme et empruntant à des corpus extérieurs. Les historiens du Zodiaque se sont généralement contentés de rechercher les attestations les plus anciennes du zodiaque mais ils n’ont guère abordé la question des sources de cette tradition, notamment en ce qui concerne les représentations des mois. On notera pourtant que dans nombre d’ almanachs, le zodiaque est signalé en rapport avec les mois (chaque mois correspondant à deux signes, à cheval), sans que cela ait suscité de travaux spécifiques. Finalement, le symbolisme zodiacal se sera développé à la façon d’un tarot, corpus dont les origines restent également assez obscures, l’approche synchronique l’emportant sur l’approche diachronique.
Jacques HALBRONN