PORTRAIT_DU_21_avril_2013.jpgOn ne présente plus Michel Granger : douze titre publiés à ce jour dont six chez Albin Michel dans la collection Les Chemins de l’Impossible dont il fut un des auteurs phare tout au long des années 1970. Pour mémoire, citons L’Alchimie, superscience extra-terrestre ? en 1972.

Ingénieur chimiste, Docteur ès Sciences de l’Université de Montréal, mais Bourguignon de naissance et de cœur, on doit ajouter au crédit de ce polygraphe de talent, outre un polar terminé en 2007 mais laissant l’auteur « insatisfait », un autre en cours depuis 2001 et six œuvres de jeunesse inédites de même veine, ainsi que près d’une centaine de nouvelles de fiction, dont beaucoup d’inédites, et encore une centaine de critiques de livres policiers.

Les fictions sont en cours de publication, ainsi que des critiques de polars et ses mémoires littéraires, sur le site que nous élaborons ensemble petit à petit…


Michel Granger fictions //

Michel MOUTET

 

Il padre Pellegrino Ernetti – par Michel GRANGER

 

C’est le regretté Robert Charroux qui, en 1973, dans Le Livre du Passé Mystérieux (1), divulgua à ses lecteurs éberlués (dont j’étais) une photo stupéfiante du Christ en croix prise, si j’ose dire, sur le vif ! Il précisait, toujours avec cette ingénuité intellectuelle si caractéristique, que « c’était incontestablement la plus sensationnelle réussite de la machine à filmer le passé avec prise des vues en direct » : une caméra sonore puisque, grâce à elle, on avait pu entendre aussi le cri de la neuvième heure de l’agonie !

En fait Charroux ne faisait là que reprendre et reproduire dans son style si personnel ce qui était paru dans le journal italien La Domenica del Corriere, le 2 mai 1972, sous le titre : « Une machine qui photographie la passé a été inventée ».

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Un moine bénédictin italien de Venise, le padre Pellegrino Ernetti, spécialisé en physique et musicologie ayant travaillé 20 ans plus tôt dans le laboratoire d’acoustique de l’Université catholique romaine de Milan, avait inventé une machine à voyager dans le temps permettant de récupérer des images et des sons du passé. Peu de détails étaient donnés sur cette fantastique découverte si ce n’est qu’elle opérait sur le principe de la reconstitution des ondes lumineuses et sonores, lesquelles, après leur émission, ne sont pas détruites « mais se transforment en demeurant éternellement présentes ».

Il fallut attendre plus de 20 ans (Charroux étant décédé) pour en savoir un peu plus sur ce mystérieux « chronoviseur ».

Ce fut le Père François Brune, grand gourou de la transcommunication instrumentale, qui, en 1993, consacra 11 pages d’un livre (2) à cette excitante énigme.Brune prétend avoir rencontré, 30 ans plus tôt, le Père Ernetti, « sur le ponton d’un embarcadère, à Venise » (sic), qui lui aurait dit quelques mots de cet « appareil mystérieux » et l’aurait invité à aller le voir dans son monastère sur l’île de San Giorgio.


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De l’entretien subséquent, on apprend quelques détails supplémentaires sur le « chronoviseur » et ce qu’il permettait de réaliser.

« C’était en trois dimensions, comme les hologrammes, avec le mouvement et le son. Mais sans la couleur ». Les divers « sondages » du passé ont permis d’obtenir l’image de Mussolini, de George Washington, tous les deux en plein discours, de Napoléon, de Cicéron… « Nous ne captons pas juste des images de gens mais des scènes de tous les jours, particulièrement de l’Ancienne Rome. Non seulement les gens sont visibles, mais aussi les maisons, les arbres, les animaux… » Les inventeurs de cette merveille, au nombre de douze, sont le Père A. Gemelli, mais aussi E. Fermi, W. Von Braun et un Professeur portugais appelé Matos.

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Le Pape Pie XII et le Président de la République italienne auraient été mis dans la confidence. François Mitterrand serait même passé voir Ernetti lors d’un voyage à Venise ! Récupérant les ondes rémanentes porteuses indéfiniment des sons et des images, le chronoviseur est constitué de trois éléments : un premier bloc capteur d’ondes avec des antennes « faites d’alliages comprenant tous les métaux » ; un sélecteur « travaillant à la vitesse de la lumière » permettant de viser la cible (lieu, temps, personnage) ; enfin, un enregistreur pour filmer, tout en perdant le relief.

Déjà, en 1960, la machine était démontée et gardée en lieu sûr.


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Certes son emploi serait un atout redoutable pour authentifier le passé mais aussi un danger pour peu que celui qui l’utilise nourrisse des ambitions personnelles. D’où sa mise au secret. Ernetti, depuis 1986, s’est tu sous la pression du Vatican. Il est mort en 1994.

Fort de ces informations sensationnelles mais très pauvres, pouvons-nous nous prononcer sur cette affaire du chronoviseur ? Un livre complet vient de lui être consacré (3). Il est navrant de dire qu’il est complètement creux et n’apporte absolument rien à ce qu’on savait déjà.

Il y a une règle qui dit que pour affirmer une chose stupéfiante, il faut des preuves à la hauteur. Et là elles font cruellement défaut.

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Même la photo du Christ prête au doute. En effet, sa ressemblance troublante avec une sculpture en bois du sculpteur espagnol Lorenzo Coullot-Valera (1876-1932) a été, depuis longtemps, remarquée. Ernetti aurait justifié cette similitude en arguant du fait que c’est normal puisque l’artiste a exécuté son œuvre en suivant les instructions d’une sœur mystique espagnole sujette à des visions extatiques de la passion du Christ.

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La sculpture reproduirait la réalité filmée directement par le chronoviseur !

Un raisonnement subtil qui ne me convainc guère.

Et vous ?

Michel GRANGER

© Michel Granger / Michel Moutet, 2013 – Les Chroniques de Mars, numéro 13, novembre 2013.

 

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1 – Charroux, Robert, Le Livre du Passé Mystérieux, Les Enigmes de l’Univers, Editions Robert Laffont, 1973.

2 – Brune, François & Chauvin, Rémy, En direct de l’Au-delà. La transcommunication instrumentale : réalité ou utopie ?, Editions Robert Laffont, 1993.

3 – Krassa, Peter, Father Ernetti’s Chronovisor, The Creation and Disappearance of the World’s First Time Machine, Boca Raton, Floride, 2000.

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