Traversant ainsi le système solaire grâce à une comète, ils croisent la planète Mars : « … ils virent deux lunes qui servent à cette planète et qui ont échappé aux regards de nos astronomes ». De fait, ces deux satellites (Phobos et Deimos) ne seront découverts qu’en 1877 par l’astronome américain Asaph Hall. Comment Voltaire a-t-il pu prévoir leur existence près d’un siècle et demi avant leur identification ? Il donne lui-même la réponse : « … je m’en rapporte à ceux qui raisonnent par analogie ». Que disent-ils ? Quatre lunes à Jupiter (découvertes par Galilée en 1610), une pour la Terre, il en fallait bien deux à la planète Mars… C’était bien pensé (même si plusieurs dizaines de satellites de Jupiter furent découverts depuis). Reste que l’on doit la toute première référence aux deux lunes martiennes à Jonathan Swift et ses « Voyages de Gulliver dans les contrées lointaines ».
La description de l’arrivée sur Terre des deux géants, leurs conversations avec des hommes – par comparaison si minuscules… – est le cadre imaginé par Voltaire pour se livrer à une violente satire sociale. Sans doute Micromégas et le secrétaire de l’Académie de Saturne s’imposeront-ils comme les plus grands extraterrestres jamais imaginés par la littérature extraordinaire. Maigre consolation sans doute pour Fontenelle (secrétaire de l’Académie des Sciences en 1699), caricaturé par Voltaire sous les traits du « petit » Saturnien (ici à droite de l’image 3, coll. Agence Martienne)…
Yves BOSSON © – pour les Chroniques de MARS, numéro 14, mars 2014.
[2 – « Micromégas ou Voyages des habitans de l’étoile Sirius », incipit in les « Voyages imaginaires, songes, visions et romans cabalistiques », tome XXIII, Amsterdam – Paris, 1788. (coll. Agence Martienne).