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De tous temps, les antiques courants initiatiques ont toujours célébré le Feu-Principe assimilé au Verbe et à la Lumière personnifiée. Entre Histoire et Tradition, Patrick Berlier, traversant le Jourdain et reprenant son bâton de pèlerin, nous invite à le suivre sur les traces des deux Saints Jean dans cet ouvrage flamboyant où les deux figures bibliques : l’Évangéliste, « l’apôtre que Jésus aimait », et le Baptiste dit « le Précurseur », sont tous deux identifiés en tant que symboles de la Connaissance et de l’Amour, aux Portes solsticiales, Jean Baptiste, au solstice d’été, et Jean l’Évangéliste au solstice d’hiver…


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Que les ouvriers travaillant sur les chantiers des cathédrales se soient réunis dans des loges, c’est certain. Qu’ils se soient regroupés dans des sociétés corporatistes, cela est aussi établi. On sait par exemple qu’en 1535 existait à Lyon une loge d’ouvriers constructeurs dite « Fraternité des libres maçons ». Le problème, c’est qu’aucun des deux saints Jean n’est ou n’a été le patron de telles fraternités. Les maçons avaient pour saints patrons Pierre, Thomas et Benoît. Pour les tailleurs de pierre, c’était saint Claude. Mais alors, d’où vient le nom « Loges de Saint-Jean » ?

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Pour les architectes des cathédrales, il était important de figurer, au moins d’une façon allégorique, la cité de la Jérusalem céleste décrite par saint Jean dans son Apocalypse. Dans certaines cathédrales, les coupoles élevées sur plan carré, au-dessus du chœur – chefs-d’œuvre d’architecture – sont la représentation symbolique de la Jérusalem céleste. Beaucoup de lustres – chefs-d’œuvre d’orfèvrerie – représentent aussi la cité sainte descendant du ciel. Cette recherche de la perfection devant également s’appliquer aux hommes – la pierre brute qui devient la pierre taillée, la construction du temple intérieur – c’est pour cette raison que les loges abritant les maçons auraient été consacrées à saint Jean l’Évangéliste. Elles auraient dès lors été nommées « Loges de Saint-Jean ». Et cette expression de la maçonnerie opérative aurait été conservée par la maçonnerie spéculative. C’est vers 1440 que le mot franc-maçon a remplacé l’expression Frère de Saint-Jean.

On peut relever que saint Jean Baptiste était un homme d’action, il se servait de ses mains pour confectionner ses habits, pour trouver sa nourriture, ou encore pour baptiser et pour désigner Jésus-Christ comme l’agneau de Dieu. À l’inverse saint Jean l’Évangéliste était un homme de pensée, chez lui la main était synonyme d’écriture, même s’il n’est pas l’auteur des livres qui lui sont attribués. Ils représentent donc, l’un la maçonnerie opérative, l’autre la maçonnerie spéculative. Pour les francs-maçons, saint Jean Baptiste est un initiateur, et saint Jean l’Évangéliste est le parfait initié. Jean Baptiste est la voix de celui qui clame dans le désert : « préparez le chemin ». Et la Franc-Maçonnerie, c’est justement le chemin, rien que le chemin. Ce chemin de l’initiation, pour celui qui vient frapper à la porte du Temple, sera semé d’embûches et formé de « voyages » qui sont autant d’épreuves. Celle de l’eau n’est pas sans rappeler le baptême.

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Le symbolisme maçonnique a attribué à Jean Baptiste l’emblème du coq, ce coq qui chante à l’aube pour saluer l’approche de la lumière du soleil, rappelant son rôle de précurseur, d’étoile du matin, annonçant la venue de la vraie lumière du Christ. Le coq est un éveilleur, il permet à l’homme de prendre conscience de son état. À ce titre il précède l’initiation, raison pour laquelle un coq figure en bonne place dans le cabinet de réflexion où est enfermé le néophyte avant son admission.

Zacharie devint muet lorsque l’archange Gabriel lui annonça que son épouse allait concevoir et donner naissance à son fils, Jean, le futur baptiseur. Il recouvra l’usage de la parole lors de sa circoncision. Ainsi Jean Baptiste permet-il au maçon de retrouver la Parole perdue. Il personnifie également le symbole maçonnique du niveau : le désert, dans lequel il crie, ou l’eau calme, dans laquelle il baptise, formant l’image même de la parfaite horizontalité. Jean l’Évangéliste, quant à lui, personnifie plutôt le symbole maçonnique du fil à plomb, en se tenant debout, à la verticale, au sommet du Mont Tabor, du Mont des Oliviers, ou du Golgotha. Il est aussi le compas, qui permet de tracer cercles ou courbes, mais qui associé à l’équerre conduit à élever le carré à partir duquel sera tracée la spirale du Nombre d’or, et c’est une élévation intellectuelle comme son Évangile.

3_-_book.jpg Les deux saints Jean offrent un lien très étroit avec la lumière, dont la quête forme l’une des valeurs de la Franc-Maçonnerie. Saint Jean Baptiste est le témoin de la lumière, il la reçoit et la réfléchit. Saint Jean l’Évangéliste laisse une place très importante à la lumière dans le prologue de son Évangile ; pour lui la lumière est la vie. Dans certains Temples pratiquant le Rite Écossais Rectifié, la fin du célèbre verset sur la lumière est inscrite à la vue de tous les Frères dans sa forme latine : Et tenebræ eam non comprehenderunt (et les ténèbres ne l’ont pas comprise). Le but final de l’initiation – l’illumination – est de quitter les ténèbres pour chercher la lumière. Dans la symbolique maçonnique, la lumière est aussi la liberté de pensée, qui tente de percer les ténèbres de l’intolérance.

Saint Jean Baptiste est fêté le 24 juin dans l’apogée de la lumière du soleil, lui qui était le témoin de la lumière primordiale et divine. On considère traditionnellement que son père Zacharie mourut alors qu’il était très jeune, le laissant fils de la veuve Élisabeth. C’est l’une des raisons pour lesquelles il est vénéré par les franc-maçons, qui se disent Fils de la Veuve, mais qui revendiquent aussi le nom de Fils de la Lumière. Symboliquement cette veuve est la nuit qui a perdu son époux le jour, selon l’une des interprétations.

Saint Jean l’Évangéliste est fêté le 27 décembre dans la nuit de l’hiver, sa lumière est un feu qui brille dans l’obscurité, la lumière d’un foyer. « Donner la lumière », en langage maçonnique, signifie que l’on enlève le bandeau qui couvrait les yeux du profane, au terme de son initiation. Il doit alors prêter serment sur les trois Grandes Lumières de la Franc-Maçonnerie qui sont l’Équerre, le Compas et le Volume de la Loi Sacrée. Dans les loges pratiquant le Rite Écossais Ancien et Accepté ce Volume est une Bible ouverte à la première page de l’Évangile selon saint Jean, sur son prologue.

Ledit prologue a bien évidemment interpellé les francs-maçons. Ils y retrouvent très largement leurs (…)

Patrick BerlierExtrait du livre : La symbolique des deux saints Jean – Arqa édition – juin 2017.


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