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RENNES-LE-CHÂTEAU – D’ARSÈNE LUPIN à MAURICE LEBLANC

777-92.jpg « Dans l’imaginaire universel, depuis plus d’un siècle avec sa première apparition en 1905, le héros mythique Arsène Lupin tient une place à part dans le cœur de tous les passionnés de littérature aventurière ou policière. « Le gentleman cambrioleur », comme on l’a très vite surnommé, a d’entrée su conquérir puis garder des générations entières de lecteurs et de passionnés. C’est l’essence même de son extraordinaire succès. Il y a à cela plusieurs raisons. Une des principales est certainement que le personnage paraît beaucoup moins lisse que ce que l’on pourrait croire de prime abord, et que l’on se prend délicieusement à soupçonner, à la lecture de toutes ses aventures, qu’il pourrait bien dissimuler une face cachée ou des origines beaucoup plus étonnantes que ce que tente de nous les présenter son biographe officiel, Maurice Leblanc, qui pourtant, il nous l’affirme haut et fort, l’a parfaitement bien connu… »

Franck DAFFOS

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Le dernier livre de Franck Daffos, publié ce mois-ci chez Arqa, Tome 6 des Chroniques de Rennes-le-Château, « Arsène Lupin – Gentleman cambriolé », nous propulse avec enthousiasme dans une dimension historique peu commune, celle du « Secret des Rois de France ». Au mystère du masque de fer sur lequel plane tant de ténèbres succède avec bonheur une série de péripéties haletantes qui nous amènent de la terre natale de Maurice Leblanc au Razès oublié des Wisigoths d’Alaric Ier. Les ponts littéraires et symboliques entre la Normandie chérie du père d’Arsène Lupin et la topographie audoise de l’abbé Henri Boudet enjambent dans ce texte éloquent bien des ombres qui se dévoileront en pleine lumière au fil de notre lecture. Avec ce livre issu de deux ans d’écriture ininterrompue et de nombreuses recherches en archives, l’auteur retrouve comme à son habitude tout son talent pour raconter avec brio des pans entiers d’une histoire inachevée, celle d’un puzzle à reconstituer…

Les Chroniques de Mars No 27.


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Depuis un demi-siècle l’ombre du romancier à succès Maurice Leblanc et de son héros mythique Arsène Lupin plane donc sur les mystères du Razès, mais nul n’a encore pu expliquer pourquoi ni à quel titre.

Pourtant…

* * *

Maurice Leblanc (1864-1941), fils d’armateur comme Jules Verne, s’essaya d’abord dans la carrière littéraire au roman psychologique, mais sans grand succès. C’est sa rencontre avec l’éditeur Pierre Lafitte au début des années 1900 qui le propulsa sur le devant de la scène, principalement avec la publication en 1905, d’abord en feuilleton dans la revue mensuelle Je sais tout, d’une anodine nouvelle prévue comme devant rester sans suite, L’arrestation d’Arsène Lupin, mais qui, devant l’extraordinaire succès remporté, devait initier une des sagas les plus populaires de la littérature romanesque française.

Durant l’été 1906 donc, Maurice Leblanc savoure dans sa chère Normandie le succès enfin arrivé auprès de sa sœur cadette Georgette (1869-1941), comédienne de théâtre en vogue à l’époque, accompagnée de son amant Maurice Maeterlinck (1862-1949), écrivain belge francophone déjà de grand renom et bientôt prix Nobel de littérature.

Tous séjournent au château de Jumièges (Seine-Maritime) appartenant alors à Charles et Ernestine Brohy, les oncle et tante maternels de Maurice Leblanc lequel fut toujours un habitué estival de châteaux familiaux puisque de plus sa sœur aînée Jehanne, épouse Prat, habita longtemps le château du XVIIIème siècle de Gueures, à 15 kms de Dieppe, puis de 1910 à 1939 l’ancienne forteresse médiévale de Tancarville où, dans la célèbre Tour du Diable, il écrivit même « Le bouchon de cristal», et dont le charme et le romantisme des lieux serviront ensuite de toile de fond, à peine grimée, à certains de ses romans.
Mais la présence de Georgette Leblanc et Maurice Maeterlinck n’est pas fortuite puisque le couple projette depuis près d’un an d’acheter dans la région l’imposante abbaye bénédictine de Saint-Wandrille de Fontenelle, près de Caudebec-en-Caux (Seine-Maritime), d’où les moines furent chassés en 1901 conformément à la loi Waldeck-Rousseau permettant certes les associations civiles, mais interdisant toute association religieuse. Hélas pour eux, rien n’est simple concernant la situation de ce monument du fait de sa réelle appartenance à une société immobilière servant de prête-nom aux Bénédictins…

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Circonstance aggravante, pour décourager tout éventuel acheteur à la vente aux enchères prévue de longue date pour le 18 septembre 1906, les religieux n’ont pas hésité à utiliser un procédé aussi inhabituel qu’inattendu: le dernier prieur de l’abbaye, Dom Joseph Pothier (1835-1923), a fait placarder une sévère mise en garde à Caudebec et Saint Wandrille :

Vente de l’Abbaye de St-Wandrille : Avis au Public

Le public est prévenu qu’aux termes de la loi canonique toute personne qui se rendra adjudicataire de l’Abbaye de Saint-Wandrille sans avoir préalablement obtenu l’autorisation du Saint-Siège sera de plein droit excommuniée et qu’il en sera de même de toute autre personne à qui elle pourra ultérieurement transmettre cet immeuble. Signé Dom J. POTHIER, O.S.B, Abbé de Saint Wandrille ».

L’excommunication ainsi formulée, du fait de la gravité des faits, l’usurpation et donc la profanation d’un édifice religieux, se retrouvait de type « latae sententiae », cas le plus extrême, et ne pouvait donc plus être levée que par le Pape. L’avertissement porte d’autant plus que Maurice Maeterlinck semble craindre cette sanction d’exclusion interdisant ensuite la réception de tous les sacrements de l’Église. S’il veut Saint Wandrille, il lui faut donc impérativement faire lever cet interdit en obtenant l’agrément du Saint Siège.

Pour ce faire, la famille Leblanc a l’idée de se retourner vers un ancien aumônier du lycée Corneille à Rouen que fréquenta Maurice Leblanc dans sa jeunesse alors qu’il logeait à la pension catholique Patry: l’érudit chanoine honoraire Armand Collette (1852-1908) qui présentait l’avantage de fort bien connaître Dom Pothier puisque partageant sa passion du chant liturgique, il avait cosigné avec lui dix ans auparavant un remarquable ouvrage sur le sujet.

De plus l’aumônier rouennais s’était toujours beaucoup investi pour l’abbaye de Saint-Wandrille et son prieur comme en témoigne, entre autres, son courrier de félicitations à ce dernier en date du 23 juillet 1898 lors de son intronisation comme abbé de Saint Wandrille :

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« Mon Révérend Père, J’ai appris à Monseigneur le Cardinal-Archevêque de Rouen l’heureuse conclusion de toutes les démarches faites pour la nomination d’un Abbé à Saint-Wandrille. Il se réjouit fort de voir ses vœux et ceux des amis de la maison enfin réalisés. Il avait, du reste, reçu une lettre du Rme Abbé Primat dont il m’a donné lecture, lui annonçant que le Pape lui avait dit dans son audience du 4 juillet qu’il désirait que l’on donnât sans retard satisfaction au Cardinal de Rouen pour l’affaire de Saint-Wandrille. »

N’ayant hélas pas l’entregent suffisant pour s’assurer de la levée de cette excommunication, le chanoine Collette choisit de s’adresser aux Lazaristes à Paris qu’il savait fort bien implantés au Vatican pour avoir pendant six ans apprécié Léopold Vannier, toujours lui, comme enseignant alors qu’il faisait à Rouen dès 1867 son Petit Séminaire du Mont aux Malades, puis son Grand Séminaire de Saint-Nicaise dès 1871 jusqu’à son ordination en 1878 en la cathédrale de Rouen. Pendant six ans en effet, de 1868 à 1873, Léopold Vannier fut basé au séminaire d’Evreux, mais le diocèse d’Evreux appartenant à la province ecclésiastique de Rouen, il se trouva dans le cadre de sa mission diocésaine plus particulièrement en charge des séminaires de Rouen, expérience oblige, puisqu’il venait juste de passer plusieurs années comme professeur au Grand Séminaire de Marseille (Bouches-du-Rhône).

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Et si le chanoine Collette fait appel aux Lazaristes, c’est qu’il pense avoir un atout décisif dans sa manche puisque il sait pouvoir compter en outre dans le premier cercle de l’entourage de Dom Pothier sur un très proche parent de ce même Léopold Vannier, prêtre comme lui mais chez les Bénédictins, Dom Pierre-Paul Vannier (1860-1914), futur fondateur ensuite de l’abbaye Saint-Benoit-du-Lac, province de Québec au Canada, qui lui aussi se passionna pour le chant liturgique sous la férule éclairée du futur abbé de Saint-Wandrille alors qu’il venait de faire profession de foi en 1881 à l’abbaye Saint-Pierre de Solesmes (Sarthe), berceau du renouveau bénédictin en France.

Léopold Vannier étant décédé en 1889, au vu de la spécificité plus qu’inhabituelle de sa demande, le chanoine Collette est logiquement dirigé à la direction des Lazaristes à Paris sur un de leurs plus éminents membres, théologien émérite et surtout confirmé à Rome, puisque titulaire d’un doctorat de Théologie passé en la Ville Eternelle en 1888, un des rares alors capable de monter un tel dossier au Vatican. Il occupe le poste clef de directeur des études de la maison-mère de la congrégation depuis 1903 et a pour nom Xavier Sackebant.

C’est un des meilleurs amis de Jean Jourde et il a, avec lui, participé à l’exploration de la cache de Sougraigne vingt et un ans plus tôt. Sackebant, qui a besoin d’une caution morale exemplaire pour le Saint-Siège, propose alors à l’aumônier de Rouen de recourir à son ami Jourde, justement formé dans l’Aude par Léopold Vannier, et qui s’illustre depuis des années pour sa résistance contre l’État félon en refusant de quitter son sanctuaire de Notre Dame de Marceille près de Limoux. Un cas de figure fort à propos et rappelant tellement Saint Wandrille qu’on ne pouvait rêver d’un meilleur témoin de moralité pour Maurice Maeterlinck auprès des autorités pontificales.

Les démarches sont prestement lancées auprès du Vatican… Trop tard, hélas ! On apprend ainsi incidemment que dès le 4 décembre 1905, le Pape Pie X a déjà autorisé un laïc à racheter l’abbaye. Qui était-il ? Un richissime industriel (chauffage et fonte), peintre, collectionneur et érudit du nom de Julien Chappée (1862-1957), qui plus est catholique militant très introduit auprès du Saint Siège.

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Pourtant, en s’étant mis en sous main au service des Bénédictins, Julien Chappée n’obéissait pas qu’à des motivations purement désintéressées et les religieux allaient bientôt l’apprendre à leurs dépends. Saint Wandrille se présentait d’abord pour lui comme l’occasion rêvée d’assouvir une belle revanche familiale contre Pierre Waldeck-Rousseau, le propre initiateur de la loi de 1901 qui, lorsqu’il était avocat, avait très sévèrement rudoyé son propre père Armand, le fondateur de la dynastie Chappée, lors du scandale de la faillite de la banque Talvende une quinzaine d’années auparavant, lui reprochant un rôle d’administrateur bien trop complaisant…

Dés qu’il fut informé de la décision papale, comprenant qu’il ne pourrait jamais acquérir l’ensemble conventuel, très intelligemment Maeterlinck jugea préférable de secrètement s’allier avec Chappée et de ne plus se porter enchérisseur à la condition que ce dernier, une fois l’abbaye acquise grâce à (…)

Franck DAFFOS © Extrait du livre « Arsène Lupin – Gentleman cambriolé » – Les Chroniques de Mars, numéro 27 – juin 2018.


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Arsène Lupin à Rennes-le-Château… ? La question a de quoi surprendre. Cependant depuis les recherches publiées il y a plus de vingt-cinq ans par Patrick Ferté sur le héros de romans de Maurice Leblanc, les découvertes se sont enchaînées et bien des pistes entrevues à cette époque se sont confirmées. D’autres, tout à fait nouvelles, grâce aux recherches inédites de Franck Daffos viennent aujourd’hui amplement valider la cohérence de la piste normande en relation avec le Razès et l’église de Rennes-le-Château de l’abbé Saunière – sans oublier également, en son temps, les révélations de Gérard de Sède guidé qu’il fut en sous-main par un invisible Pierre Plantard tapi dans les coulisse de l’Histoire…

Mais avec quelles sources, avec quels renseignements exactement, avec quels éléments obscurs venus du fond des âges, tous ces initiés qui composent cette saga nous enseignent-ils… ? Quelle fut aussi la part authentique dévolue à ce mystérieux « docteur Hervé » dont il est question dans le dossier Lobineau déposé en toute discrétion à la Bibliothèque nationale de France, à propos de la généalogie des Rois de France… ? Le fil conducteur de ce scénario stupéfiant qu’a été la rédaction de « L’Or de Rennes » de Pierre Plantard et Gérard de Sède, en 1967, est d’ailleurs à lui tout seul une rocambolesque entreprise « lupinienne » pourrait-on écrire… Franck Daffos, dans cet ouvrage absolument remarquable par les découvertes effectuées nous convie à le suivre, une fois de plus, dans ce tome VI des « Chroniques de Rennes-le-Château », dans de nouvelles découvertes extraordinaires… Du bien curieux fort de Fréfossé si évocateur de La Tour Magdala, d’Arsène Lupin à Maurice Leblanc et aux abbés des deux Rennes, le fil de trame se laisse découvrir peu à peu au fil des pages lues, sans oublier La Comtesse de Cagliostro, L’Aiguille creuse, Dorothée danseuse de corde, et bien sûr L’île aux trente cercueils. Sans conteste, à la lecture de tant de révélations le mystère semble se déchirer définitivement et les pièces lumineuses proposées dans ce livre magistral viennent s’imbriquer parfaitement dans l’incroyable puzzle que Franck Daffos reconstitue patiemment depuis maintenant près de vingt années de publication.

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Entretien avec Franck DAFFOS // Arsène LUPIN à Rennes-le-Château #1

Entretien avec Franck DAFFOS // Arsène LUPIN à Rennes-le-Château #2

Franck DAFFOS // L’incroyable secret de l’Abbaye de Saint-Wandrille

Franck DAFFOS // Le mystérieux « Docteur Hervé »

Franck DAFFOS // De l’aiguille creuse et le donjon d’Arques

Thierry E. GARNIER // De Jules Verne à Maurice Leblanc – aux sources du mystère

Thierry E. GARNIER // « L’Île aux 30 cercueils » – L’énigme des 3 CARTES – Boudet – Verne – Leblanc

Thierry E. GARNIER // Braquage à Rennes-le-Château

Franck DAFFOS // La véritable utilité du jumelage des deux tableaux de Rennes-les-Bains


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