Paradis pour les touristes, le sport extrême, et les chercheurs de trésors (ici, celui des Templiers), les Gorges du Verdon, ses à-pic vertigineux et ses paysages grandioses mondialement connus, ne sont plus, l’hiver, sur les hauts plateaux arides qui bordent au Sud l’impétueuse rivière, qu’un pays de militaires et de moutons.
C’est là, sur le Plateau de Canjuers (les militaires occupent 35 000 hectares), que, voici près de 20 ans, un mystère surgit ; quelques milliers de moutons sont encore autorisés à pénétrer le terrain militaire, le pâturage permettant d’entretenir une bande coupe-feu.
La première « attaque » pour laquelle un berger ait entrepris des démarches administratives date de septembre 1992.
27 moutons morts en une nuit (il en perdra au moins une centaine. Et il n’est pas le seul). Le vétérinaire qui fera l’autopsie conclura que les bêtes ne se sont pas affolées. Les lésions sur les cadavres sont toujours identiques : traces de morsures sous le cou, sur les épaules et en dessous, et quelques traces au gigot (1).
Si certains pensent qu’il puisse s’agir d’opérations militaires secrètes, le loup et les chiens errants sont envisagés. Cependant, les bêtes tuées ne sont pas mangées.
LYNX OU PUMA ?
Curieusement l’Office National de la Chasse publie dans un rapport daté de décembre 1992 : « Le lynx tue systématiquement ses proies, qu’elles soient sauvages ou domestiques, par strangulation ». Exit donc le lynx qui, il faut le savoir, disparut du Massif des Maures à la fin du 17ème siècle.
On jase dans les campagnes : « Un vieux berger très respecté, Octave Lions, est persuadé qu’il s’agit d’un lynx et peut-être même d’un puma. Personne n’ose en rire car Octave est le doyen.».
C’est pourtant très peu probable a priori pour le premier, et totalement impossible relativement à son habitat pour le second. Mais ça ne supprime pas toutes les explications, puissent-elles paraître aberrantes.
DES TÉMOIGNAGES INÉDITS
– Fin 1970 : le camp militaire n’existe pas encore. Je suis avec un ami sur le Petit Plan de Canjuers. Un lynx traverse la route devant notre voiture.
– Quelques années plus tard, de nuit, près du village de Flayosc, un lynx traverse la route dans la lueur des phares. Nous étions, là aussi, deux à le voir.
– Encore quelques années plus tard. A au moins 30 mètres de la route, un animal couché se lève et part dans les bois en direction de Salernes. On aurait bien dit un puma.
– Je revois, plus de trente ans après, l’ami avec qui j’avais fait la première observation. Je lui rappelle le lynx et lui dit que j’en avais vu un autre. Il me dit que lui aussi : même époque et même coin. Je lui parle donc du puma. Lui également, près de Salernes, à la même époque que moi encore, vit aussi fugitivement un animal dont on aurait bien dit que ça puisse être un puma.
« On aurait bien dit… » : c’est la même formule qu’avait employée Haroun Tazieff (le premier de mes amis concernés, aussi, était volcanologue. Quelqu’un veut-il affirmer que la fréquentation des volcans crée une propension aux hallucinations ?) à propos d’un ptérodactyle ; mais, c’est une autre histoire…
Et personne, apparemment, ne se rappelle d’une autre affaire, qui défraya la chronique pendant un bon nombre de jours au milieu des années soixante. Celle de la « Bête de Pignans », dans le Var aussi (la Bête du Bas-Var en quelque sorte). Cette dernière ne s’était intéressée qu’à la volaille. La conclusion zoologique fut, grâce aux empreintes, qu’il s’agissait d’un lycaon pictus (animal spécifique à l’Afrique). Qui, comme bien d’autres animaux « déplacés », disparut comme il était apparu…
En fait, et régulièrement, beaucoup d’animaux, « déplacés », disparaissent comme ils étaient apparus. Ainsi la Bête du Devonshire, qui sévit entre autres à Teignmouth, dont le collectionneur de l’étrange que fut Charles Hoy Fort estime avec humour « qu’il n’aurait pas fallu moins de mille kangourous unijambistes, tous ferrés d’un sabot minuscule, pour laisser dans la neige (ces) empreintes »…
Michel MOUTET et Mara McLaren pour – les Chroniques de Mars No 8 – avril 2012
(1) Pour un complément d’enquête voir à ce propos le livre L’Ile des Veilleurs. Contre-enquête sur le mystère du Verdon & le trésor de l’Ordre du Temple, par Paul Amoros, Richard Buadès, et Thierry-Emmanuel Garnier, aux éditions Arqa, ainsi que dans les Archives de La Lettre de Thot ici et là.