Les événements actuels auront été définitivement fatals à l’astrologie thématologique, sous toutes ses formes ou du moins en auront révélé les limites durant la moitié du temps.
Il faudrait déjà en finir avec ces gentils astrologues qui ont leur collection de dates de naissance et de thèmes, qui font penser un peu aux emprunts russes, c’est-à-dire qu’ils ne valent plus grand-chose. On n’a que faire de connaître le thème de la Tunisie, de l’Egypte ou de quelque pays que ce soit car il est des périodes où tout cela n’ a vraiment plus aucune importance ni signification. Et cela vaut aussi pour les thèmes individuels quand on regarde des centaines de milliers de personnes se retrouvant au même endroit en même temps. Quand l’astrologie bat son plein et accède à ses manifestations les plus flagrantes, il n’est plus question de thème mais de cycle, le thème n’ étant qu’un sous-produit assez douteux et indigeste du cycle. L’idée d’une quelconque localisation de l’impact astral est une des pires idées qui soit et l’apparence de vérification qui eut lieu en 1989 orientera pour deux décennies l’astrologie mondiale sur une fausse piste. L’astrologie en soi ne connaît pas de frontières et seule la géopolitique peut compléter et préciser l’approche proprement astrologique.
Quand l’astrologie mondiale ne prévoit pas à temps l’émergence d’un certain type d’événement comme ces rassemblements de masse, elle doit alors se contenter de miettes mais cela ne fera jamais le poids. Quand on a manqué le train de l’Histoire, on l’a manqué et cela ne se rattrape pas. A moins que l’astrologue ne se contente d’être un gagne-petit passant de la macro-histoire à la micro-histoire. Or, l’astrologie mondiale n’est pas faite pour la micro-histoire, elle doit donner les grandes lignes suffisamment longtemps à l’avance et non les détails à la petite semaine, après coup. Il est vrai que cela fait déjà belle lurette que certains astrologues axés sur l’individualité tendent à penser que les grands événements leur échappent et que la sagesse consiste à surfer sur ce que rapportent les journaux, lesquels fourniraient la toile de fond au travail proprement dit de l’astrologue. Un tel repli stratégique nous semble désastreux même s’il peut sembler réaliste au regard des performances de certains astrologues prédictifs, plus ou moins irresponsables..
Nous voudrions dénoncer ici une contre-vérité, celle qui nous parle d’une astrologie proche de la Nature alors que l’astrologie en est une transposition intellectuelle, une imitation, un dépassement. Est-ce qu’il est « naturel » que des foules se rassemblent comme elles le font périodiquement, en quelque sorte sans chef, comme guidées par une main invisible ? L’on passe alors d’un chef d’orchestre terrestre à un chef d’orchestre céleste, qui n’est d’ailleurs pas moins contraignant et exigeant, la preuve étant que le dit chef d’orchestre céleste parvient à rassembler dans un espace temps étroit un nombre immense de gens, ce qui n’a rien de « naturel », ni d’individuel, ni de « libre ». Il faut bien comprendre que lorsque nous entendons décrire les vrais rouages –et c’est le cas de le dire – de l’astrologie – nous ne sommes pas dupes. L’astrologie est aliénante pour l’humanité, quand bien même serait-elle « vraie ». L’un n’empêche pas l’autre. Et c’est quand la pression astrologique décline, la moitié du temps, comme en une sorte de nuit, d’hibernation, que l’Humanité est la plus libre, la plus « naturelle ». En ce sens, le départ, en 2011 d’un Ben Ali ou d’un Moubarak, et en 1989 d’un Ceaucescu etc, est le triomphe de la Loi astrologique la plus totalitaire. D’ailleurs, n’oublions pas que chaque phase se termine à un moment donné car, par delà son timing rigoureux, elle tend à s’épuiser. A un moment donné, les hommes préfèrent encore un chef en chair et en os, qu’une force mystérieuse qui les hypnotise et les asservit au nom d’une utopie égalitaire qui préfère un chef invisible mais néanmoins tout puissant. C’est le rejet du Père que nous vivons actuellement.
Quant au thème individuel, il est tout aussi artificiel, il construit de toutes pièces des individualités de sorte qu’il n’est même plus besoin d’être créatifs, d’affirmer sa différence par ses œuvres puisque le thème, par une sorte de grâce, nous confère d’emblée une originalité en quelque sorte originelle, celle de notre naissance. Là encore, on est dans une sorte de trucage. Mais à la différence de l’astrologie mondiale bien comprise qui décrit une technologie qui existe bel et bien à l’échelle de l’Histoire, l’astrologie individuelle n’est qu’un artefact artisanal établi par l’astrologue et qui n’existe qu’au sein de la relation « thérapeutique ».. Tant qu’à faire, mieux vaut aller voir un vrai « voyant » qu’un sous-voyant ne pouvant accéder à autrui- ou du moins le croit-il – que par le truchement de techniques (astrologie, numérologie etc.). On retrouve encore le spectre techniciste, à une toute petite échelle, cette fois.
A propos de la crise du pouvoir, force est de constater qu’elle concerne aussi les sociétés astrologiques. Le problème, c’est que cela manifeste par une crise du recrutement. Ce n’est pas comme dans un pays, où les gens naissent et doivent subir une autorité plus ou moins légitime. Dans l’Astroland, le désaveu des dirigeants se manifeste par l’absence, en l’occurrence, celle des hommes qui boudent dans leur très grande majorité l’Astrologie. Quand on pose la question, on entend les réponses les plus affligeantes, symptôme d’une politique de l’autruche. Au lieu de constater qu’il y a problème, on tombe dans les clichés les plus éculés sur l’éternel féminin. C’est ainsi qu’un pouvoir incapable se perpétue impunément parce qu’il n’est pas sanctionné. C’est comme un homme qui vivrait seul depuis des années et qui ne se remettrait pas en question. L’isolement de l’astrologie est l’expression d’un dysfonctionnement du milieu astrologique à commencer par le fait de censurer tout ce qui pourrait entraver un certain ronronnement qui n’est en fait qu’un disque rayé. Les travaux d’Hercule comportent l’épisode des Ecuries d’Augias. Ce que d’aucuns appellent l’astrologie est en fait comme une cuisine où l’on n’aurait pas fait la vaisselle depuis des semaines et où la saleté se serait incrustée au point que l’on ne saurait plus la détacher. L’astrologie actuelle est dans cet état de saleté incrustée. Il lui faut un détergent puissant pour qu’elle puisse retrouver sa virginité, que l’on puisse parler enfin d’une astrologie au sens « propre ».. Elle a besoin d’une bonne douche et aussi d’une bonne lessive.