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L’ALCHIMIE une Tradition vivante

Abordant la connaissance de la Matière – qu’elle soit alchimique ou infra-atomique – et ses possibles mutations et transmutations – cheminant de la Physique Quantique à la construction de l’Univers – ce numéro 28 des CHRONIQUES de MARS désire, pour une fois, présenter l’Alchimie Traditionnelle sous un angle bien différent de celui que nous avons l’habitude de côtoyer. Les relations entre SCIENCE et ALCHIMIE et ALCHIMIE et SCIENCE ont toujours plus ou moins tenté, habilement ou avec fracas, de cohabiter… Comment cet Art du FEU multimillénaire et cette Science dure pluriséculaire interagissent entre elles pour créer, depuis tant de temps, non seulement une répulsion incontestable mais aussi une attractive fascination, des Rose-Croix du XVIIe siècle pour lesquels les frontières étaient totalement poreuses jusqu’aux incroyables expériences actuelles sur les transmutations à faible énergie, tout est maintenant rendu plus clair, car il est incontestable – pour celui qui voudra bien se pencher sur le propos – que la limite entre ces deux Connaissances n’a jamais été aussi ténue…

Tous les alchimistes de grand talent qui sont ici présentés sur notre espace d’échanges – libre et gratuit – et sans aucune publicité, présentent chacun leur éclairage sensible afin de nourrir un débat constructif et pertinent, et vous retrouverez sur la Boutique d’Arqa, tous leurs livres pour approfondir les sujets traités. Si nous avions pu les réunir tous, dans un même lieu et dans un même temps, au cours de l’année 2018-2019, nul doute que nous aurions pu assister au plus beau Colloque sur l’Alchimie et sans doute le plus important de ces 30 dernières années, puisque l’on compte, entre autres dans ce Numéro Spécial, pas moins de 4 disciples d’Eugène Canseliet (Bernard Chauvière, Georges Llabrès, Robert Delvarre, Roger Bourguignon), plusieurs alchimistes opératifs écrivant déjà dans notre WebZine depuis plusieurs années dont notamment François Trojani, ainsi que Cédric Mannu, historien de l’Alchimie, scientifique et biographe de Canseliet (Biographie préfacée par Béatrix Canseliet) ; plus deux scientifiques de premier plan, étant par ailleurs, eux aussi, des alchimistes chevronnés, auxquels nous rajoutons volontiers feu Roberto Monti qui a présenté en photos une magnifique transmutation sur notre site, et de nombreux amis et historiens de l’Alchimie, spécialistes de la voie de Caro ou de Canseliet, que vous retrouverez dans notre Sommaire. Qu’ils soient tous, ici, très sincèrement remerciés de leur collaboration amicale et fraternelle, dans le cadre de ce Numéro Spécial. En vous souhaitant de très bonnes lectures hermétiques en ce solstice d’Hiver et en cette période de la Nativité…

Thierry E. Garnier – « Chroniques de Mars » No 28, Solstice d’hiver – Décembre 2019 – Numéro spécial Alchimie.


NEUF LIVRES à découvrir ce mois-ci sur le site des éditions Arqa

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Les Amis de Roger Bourguignon // « Roger Bourguignon – Disciple d’Eugène Canseliet »

Bernard Chauvière // « Réflexions Hermétiques – Pratique de la voie alchimique – Le second Œuvre »

Georges Llabrès // « Pratique de la voie alchimique – De Nicolas Flamel à Eugène Canseliet »

Cédric Mannu // « Nassim Haramein – Petit essai de Métaphysique quantique »

Roberto Monti // « L’Alchimie est une science expérimentale »

François Trojani // « Éternelle Rose-Croix »

Bernard Chauvière // « Aperçus alchimiques »

Cédric Mannu // « La Table d’Émeraude »

Jean Artero // « FULCANELLIANA »

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L’ALCHIMIE & les Origines de la VIE – (Alchemy and life origin)

Résumé : plusieurs hypothèses sont avancées par les chercheurs aujourd’hui pour expliquer l’apparition des premiers êtres unicellulaires (les archées) et donc l’origine de la vie sur terre : l’apport par les météorites/comètes des premières bases biologiques (acides aminés… voire davantage), leur génération au tréfonds des océans le long des dorsales océaniques par les fumeurs noirs et enfin les geysers avec leur alternance de phases humides et sèches avec des milieux chargés de matière acide et sulfurée, comme autour des fumeurs noirs d’ailleurs.

Nous allons nous focaliser sur cette dernière hypothèse : ce « solve et coagula » naturel n’étant pas sans rappeler les opérations effectuées en alchimie, c’est tout naturellement que s’est posée la question du parallèle entre la génération des premiers éléments de la vie dans la nature et le principe vital que prétendent déployer les alchimistes.

Les composés alchimiques qui rappellent le plus les environnements hostiles comme les geysers du parc de Yellowstone aux USA ou « l’enfer de Dallol » au nord-est de l’Éthiopie, sont ceux utilisés dans la voie du « vitriol » décrite par Basile Valentin. Nous avons pu avoir à disposition plusieurs de ces composés élaborés par l’alchimiste Georges Llabrès. Nous avons eu l’idée d’en prélever quelques échantillons afin de les observer au microscope. De manière surprenante, dans ce milieu très acide (pH2 à 3) et chargé de sulfures métalliques, nous avons cru détecter des microbactéries. Le type de ces microorganismes très ressemblants aux eubactéries de par leur taille (quelques microns) et leur apparence (pas de noyau ni d’organites), suggère parce qu’elles supportent des milieux extrêmes que nous sommes en présence d’archées. Une mise en culture sur pétrifilm à température ambiante a confirmé grâce à l’observation de colonisations, la présence de microorganismes vivants capables de se reproduire dans ces conditions extrêmes. Aucune analyse génétique n’a toutefois validé cette hypothèse. Leur arrivée dans le vitriol alchimique n’est pas expliquée : plusieurs possibilités de contamination existent. La question de l’intérêt de cette forme de vie originelle quant au processus alchimique est abordée.

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Abstract : several hypotheses are proposed by researchers today to explain how appeared first unicellular beings (archaea) and thus what is the origin of life on earth: the transport by meteorites/comets of the first biological bases (amino acids … or even more), their generation in the abyss of oceans along the tectonic subduction zones by black smokers and finally the geysers with their alternate wet and dry phases with liquidsloaded with acidic and sulphurous matter, as around black smokers. We focus on this latter issue: this natural “solve et coagula” reminds straightforwardly some operations performed in alchemy. Consequently, the parallel between the formation of the first life components in nature and the vital principle that pretend to develop alchemists is a normal question that we decided to investigate in this article.

Alchemist aggregates that are the closest to hostile environments like geysers of Yellowstone Park in the USA or of “Dallol hell” in the north-west of Ethiopia, are those used in the way of “vitriols” described by Basilius Valentinus. We could benefit from preparations performed by the alchemist Georges Llabrès. It is constituted by very acidic medium (pH 2 to 3) loaded with metallic sulphides. We sampled some of them and performed a microscopic analysis. Surprisingly, some microbacteria could be observed : size of a few microns; no nucleus nor organelles. Because it could survive in extreme medium, it suggested we were facing archaea. Cultivation at different dilutions on petrifilm at room temperature has confirmed these microorganisms could replicate in such extreme conditions: several locations evidenced the presence of typical colored clusters. No genetic test could be realized yet to validate that we really had archaea although this seemed the most likely hypothesis. Their presence in alchemist vitriol is not explained yet. The interest of this original form of life regarding alchemist process is discussed.

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Introduction

Les curieux de biologie versés dans l’étude et la pratique de l’alchimie se seront sans doute délectés d’un récent article de « Science et Vie » de février 2018, intitulé « origine de la vie » de Matthieu Grousson (pp 102-108). Il résume et illustre un autre article paru dans la revue « Life » de Bruce Damer & David Deamer en 2015 (1). Le propos concerne les dernières hypothèses relatives à la naissance du vivant, désormais les plus plausibles aux yeux des spécialistes… Rien de moins ! On y parle de sel d’ammonium, de phosphate, de lumière solaire, de chaleur… mais aussi de phases sèches alternant avec des phases humides (notre bon vieux « solve et coagula »). Le mot « Graal » est même prononcé et le meilleur des solvants – l’eau – y est aussi à l’honneur : elle serait « indispensable pour dissocier les sels, structurer les briques élémentaires du vivant… » Le lieu privilégié pour cette alchimie de la vie ? Les sources hydrothermales jaillissant de terre jadis à « l’air libre », riches en ions métalliques et en sel… notre vitriol n’est pas loin !

1-163.jpg Il paraissait donc intéressant, une fois de plus, de faire quelques parallèles entre les recherches modernes et les théories des anciens alchimistes. Mais exposons d’abord les faits. Il faut remonter quelques milliards d’années en arrière, dans le passé lointain de la terre. Quand on parle aujourd’hui des origines de la vie, on pense à plusieurs hypothèses : une d’entre elles propose que les premières molécules organiques complexes (les éléments carbonés comme les alcools, certains acides aminés…) auraient été amenées peu après sa formation (environ 4 milliards d’années en arrière) via le bombardement de météorites et de comètes constituées principalement, comme on le sait, d’eau.

Une seconde hypothèse, proposée il y a 25 ans par l’astrobiologiste Michael Russell, met en cause les « fumeurs noirs » au fond des océans. Ces cheminées sont des résurgences d’eaux marines chargées en éléments métalliques et en sulfure d’hydrogène situées au niveau des dorsales océaniques. Elles proviennent de l’infiltration de l’eau de mer à la faveur des nombreuses failles et fissures qui jalonnent le périmètre de la dorsale océanique. L’eau se réchauffe en profondeur en s’approchant du manteau terrestre presque affleurant à ce niveau. De nombreux échanges entre l’eau de mer et les roches traversées se produisent conduisant à l’acidification extrême de ces eaux et à la réduction du soufre sous forme de sulfures. A 500°C es eaux sont assez agressives pour dissoudre les éléments métalliques et elles remontent vers la surface dans un mouvement convectif ascendant, émergeant au niveau des fumeurs noirs à 350°C, crachant leurs sels métalliques et précipitant la majeure partie d’entre eux sous forme de sulfures. La pyrite de fer qu’affectionnent les alchimistes abonde dans ces environnements.

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Contrairement à il y a quelques décennies où l’on pensait la vie impossible dans cet environnement totalement obscur, où règne une température élevée et une pression colossale, on sait aujourd’hui qu’une faune tout à fait étonnante peuple ces abysses des plus inhospitaliers (sur la photo 1 de l’Ifremer, on aperçoit une population de crevettes). La présence de soufre et de métaux lourds ne semble en rien gêner ces habitants… Au contraire, il y a des « microbes » qui utilisent le soufre pour résoudre le problème de la production d’énergie. Peut-être même tous ces composés chimiques ont-ils favorisé la genèse de ces bactéries. Bon ! Qu’on se rassure, toutes cette faune ne vit pas à des températures mercurienne, comme l’indique ce schéma de la banque SVT de l’Académie de Dijon :

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Certaines de ces bactéries vivent en symbiose avec le ver Rift iapachyptila qui capte étrangement l’oxygène, mais aussi le sulfure d’hydrogène avec son panache de branchies (en rouge sur la photo 2).

4-112.jpg Les bactéries qui vivent dans les tissus du ver oxydent le H²S en soufre et H²O et ces réactions très exoénergétiques permettent aux bactéries de fixer le CO² et de le réduire en molécules organiques comme le font les végétaux terrestres lors de la photosynthèse. On appelle d’ailleurs ce phénomène, une chimiosynthèse et il est très répandu chez les eubactéries (bactéries vraies) et les archées.

Ainsi, un écosystème très particulier se forme à ce niveau, où les riftia jouent en quelque sorte le rôle des végétaux ou plutôt des végétariens dans nos écosystèmes terrestres (car les riftia assimilent bien entendu les bactéries mortes dans leurs tissus). Ils sont le point de départ de chaines alimentaires complexes, mais existant sans lumière et dans ces conditions de milieu extrêmes.

La troisième hypothèse, étayée dans les récents articles précités, propose un environnement non moins inhospitalier au tout début de la terre, puisque privé d’oxygène, saturé en CO², en vapeurs soufrées, etc. C’est cette dernière hypothèse que nous allons décrire, gardant à l’esprit que ces trois explications de l’origine de la vie ne sont, après tout, peut-être pas aussi incompatibles que cela.

Contexte : l’environnement de la terre, voici4 milliards d’années est appelé ère « prébiotique », c’est à dire d’avant l’apparition de la vie… Si l’on veut se faire une idée simpliste de cet environnement primitif, on peut aller visiter l’Islande et ses geysers, ou encore ceux de Yellowstone aux USA, en particulier ceux qui alternent des périodes d’activité (phase d’hydratation) et des périodes de repos (phase de dessiccation ou déshydratation). Damer & Deamer suggèrent aussi les régions volcaniques quand la pluie arrose copieusement les sols en créant de-ci de-là des mares qui s’évaporent ensuite sous l’effet de la chaleur du sous-sol. Ilscitent en exemple le « Bumpass Hell », sur le mont Lassen en Californie.

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Le mont Moutnovski dans la péninsule du Kamtchatka (Russie), semble présenter de conditions analogues. Des souches d’archées anaérobies et thermophiles spécifiques y ont été découvertes – et séquencées en 2011(2) -. Les archées sont des organismes unicellulaires primitifs, sortes de cellules sans noyau ni organites et disposant d’un unique chromosome comme les bactéries qui nous sont plus familières. Leur membrane lipidique est particulière, car bien que constituée de phospholipides, celle-ci est rendue plus résistante par la formation de liaisons covalentes éther entre les extrémités hydrophobes des lipides. Notons que les phospholipides sont des molécules singulières par leurs propriétés. En effet, constituée d’un acide gras estérifié par un groupe acide phosphorique (souvent complété par d’autres molécules comme des alcools, des sucres), elles s’assemblent spontanément en bicouche de lipides, les chaines d’acides gras se faisant face et les extrémités polaires de ces molécules étant exposées aux milieux interne et externe. Comme nous le verrons plus loin, des vésicules sont ainsi constituées, isolant le milieu externe du milieu interne et formant ainsi le creuset ou peut être devrions nous dire l’œuf philosophique permettant les réactions biologiques.

Notons bien que certaines souches d’archées sont « extrêmophiles », mais pas toutes.

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Plus récemment, Grégory Fléchet (2016, journal du CNRS, photo 5) décrit dans son article intitulé « l’enfer de Dallol », un environnement de ce type situé au nord-est de l’Éthiopie, à quelques kilomètres de la frontière avec l’Érythrée. Dans certaines mares saumâtres le taux de saturation en sels avoisine les 50 %, (deux fois plus élevé que celui de la mer Morte) et le pH y est particulièrement acide ; en outre, la température dépasse régulièrement les 100°C à la sortie des geysers.

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L’auteur de l’article déclare que « Dallol pourrait constituer un milieu analogue aux environnements présents sur Terre il y a plus de 3,5 milliards d’années, lorsque la vie fit son apparition ».

Les échantillons étudiés à l’université Paris Sud d’Orsay révèlent la présence d’archées étonnamment petites grâce à l’étude au microscope électronique. Actuellement des études génétiques sont en cours pour dresser l’inventaire des espèces présentes sur ce site et connaître leurs adaptations moléculaires. Purificación López-García, chercheuse à l’université de Madrid, interprète la petite taille de ces microorganismes comme une adaptation à un milieu pauvre en ressources énergétiques. Les premiers résultats de ces travaux montrent que certains des micro-organismes découverts à Dallol sont très proches, sur le plan génétique, de ceux vivant dans les saumures au voisinage des sources chaudes localisées au fond de la mer Rouge et de la Méditerranée.

Processus suggéré à l’origine de la vie

La manière dont se formeraient les premières structures de la vie, à partir des briques primaires venues de l’espace et/ou synthétisées directement sur terre, est schématisée de manière suivante par les auteurs :

Schéma 3 : Schéma de la structuration progressive des vésicules de plus en plus complexes suite à l’alternance de phases sèches et humides. D’après Damer & Deamer (2015), op. cit.

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Dans les mares volcaniques, les briques primaires (acides aminés, bases azotées, acides gras) s’agglomèrent en différentes structures, notamment les fameuses vésicules lipidiques dont nous avons parlé plus haut (A). Quand la mare s’assèche, les lipides se déposent en couches alternant les différents composants. Quand l’humidité revient, certaines structures se forment, deviennent pérennes et s’enrichissent à partir du matériel déposé… un cycle sans limite pouvant aboutir à des « cellules » primitives capables de perdurer et se diviser. Il est clair qu’il y a d’importantes lacunes dans cette hypothèse, dont l’inexistence d’un minimum d’information (de l’ADN ou de l’ARN) pour que les proto-cellules puissent se multiplier… Mais au moins elle a le mérite de suggérer un début d’explication à une partie du processus global.

9-27.jpg Les auteurs de l’article ont créé des représentations d’artiste montrant ce type formation sous la forme de couches sédimentaires le long d’une paroi rocheuse baignée par une source hydrothermale (d’après Damer & Deamer (2015), op. cit.) :

La flèche blanche indique les dépôts « biologiques » qui s’accumulent sous l’effet des fluctuations de la source sur les parois où se produit l’alternance.
On peut penser que les marées induites par la lune pourraient à leur manière rythmer de manière similaire la synthèse de matière organique ou son développement.

Quel intérêt ce phénomène peut-il avoir quant à l’alchimie ?

Certains travaux dans cette discipline créent des environnements sans doute pas très éloignés de la « soupe primordiale » terrestre où la vie primitive est supposée être apparue… On peut évoquer en particulier la voie du vitriol décrite par Basile Valentin (3). Pour Basile Valentin (1565-1624 dans Wikipedia), on peut partir du vitriol de Hongrie dont il dit qu’il est le meilleur (à son époque), vitriol naturel composé de sulfate de fer ou de cuivre. On trouve aussi des descriptions similaires anciennes, environ un siècle plus tard, chez le naturaliste Buffon (Georges-Louis Leclerc de Buffon : 1707-1788) (4) : « On a donné le nom de vitriol à trois sels métalliques, formés par l’union de l’acide vitriolique avec le fer, le cuivre et le zinc ; mais on pourroit, sans abuser du nom, l’étendre à toutes les substances dans lesquelles la présence de l’acide vitriolique se manifeste d’une manière sensible : le vitriol du fer est vert, celui du cuivre est bleu, et celui du zinc est blanc ; tous trois se trouvent dans le sein de la terre, mais en petite quantité, et il paroît que ce sont les seuls matières métalliques que la Nature ait combinées avec cet acide ; »

Voici une photographie de vitriol philosophique réalisé par l’alchimiste Georges LLabres (5) :


Remarque de Georges Llabrès : « le lecteur intéressé par ce double vitriol cupro-ferrique pourra se référer pour de plus amples détails à mon ouvrage paru en 2017 aux éditions ARQA.]

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NOTA // Toutefois l’honnêteté m’amène à dire que j’ai mené successivement 2 types de traitements sur un double vitriol en préalable longuement exposé aux influences soli-lunaires dans un bain d’eau de pluie. Dans la première approche, j’ai traité par l’urine fraîche ce vitriol déshydraté pour des motifs qu’un lecteur attentif de feu Eugène Canseliet (Deux logis alchimiques) et plus précisément les commentaires sur le « soffite » du Plessis-Bourré intitulé « la fontaine indécente ». Le résultat coloré des premières imbibitions/dessications semblait correspondre au processus espéré. Toutefois, le résultat final de cette première phase donna une matière inadéquate. Et je renonçai à poursuivre au-delà.

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Devant cet échec, j’ai alors utilisé du chlorure d’ammonium en lieu et place de l’urine suivant ainsi la préconisation d’Isabelle Canseliet donnée il y a déjà quelques années. Ce sont donc ces seconds composés qui font l’objet des photos et du présent article. De même je pense, qu’outre le % de sel ammoniaque que le chercheur devra établir, il serait peut-être judicieux d’utiliser un complexe salin dans lequel entrerait en moindre proportion un 2ème corps présentant avec l’ammonium une relation selon ladite loi des affinités exposée dans les ouvrages de chimie au 19ème siècle par Mrs Troots et Wurtz. Ces corps salins pouvant être le sodium ou le potassium dans une forme adéquate.

Il faut rappeler à ce propos que les chlorures de ces deux métaux ne furent différenciés par Berzelius qu’au début du 19ème siècle et que jusque-là, ils étaient confondus au bénéfice du sel commun, le chlorure de sodium, vu leurs propriétés physicochimiques quasiment identiques. Pour de meilleures informations sur ces 3 sels chlorés, l’étude des planches 7 et 8 du « Mutus Liber » et des commentaires d’Eugène Canseliet s’imposent de toute évidence.

Enfin, il faut préciser que ces 2 clichés ne représentent que la première phase aboutie d’un très long processus qui en compte 3 au terme desquelles l’aspect et la couleur auront subi des changements substantiels qui l’apparenteront à la substance vue à Savignies dans un petit ballon bouché, de couleur pourpre foncé et de densité fort légère qu’il me fut permis de considérer tout à loisir. »

Sur la photographie 7 (ci-après), on remarque les « migrations » salines qui chaque jour (plus ou moins selon les phases de la lune) s’élèvent sur la paroi de verre. Elles font penser au phénomène de sédimentation qui apparaît sur les parois rocheuses où alternent les phases sèches et humides d’après Damer & Daemer et où pourraient se développer les premières formes de vie.

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Le pH de ce composé vitriolique se situe entre 2 et 3, c’est à dire que ce milieu est très, très acide… Il est donc absolument inadapté à toute vie bactérienne normale. Des prélèvements ont toutefois été réalisés pour un examen microscopique : on voulait juste vérifier, suite à l’article de Science et Vie, qu’il n’y aurait pas des vésicules en formation dans les sédimentations au niveau des parois (comme schématisé sur la figure 3 et la photo 5).

De la vie primitive dans les prélèvements vitrioliques ?

Une analyse au microscope x 1000 réalisée à partir des prélèvements dans quatre préparations différentes a donné des résultats inattendus :

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Bien sûr il serait très hasardeux de conclure dans l’état actuel de la recherche à la présence définitive d’archées dans les vitriols.

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Le halo observé autour des vésicules qui réfracte la lumière fait penser à la présence d’une capsule (enveloppe organique complexe) qui entoure fréquemment ces cellules. Ce pourrait être aussi le cas pour d’autres types d’eubactéries. Néanmoins, leur présence et leur survie dans un milieu aussi acide fait pencher la balance vers l’hypothèse « archées ».

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Une tentative de culture sur pétrifilm a été effectuée, ceci afin de vérifier si nous sommes bien en présence de microorganismes vivants. S’ils se multiplient, on sera en droit de conclure que c’est le cas. Nous avons procédé à des ensemencements après une dilution 10-1, 10-2, 10-3 dans du sérum oculaire (donc non contaminé). La photographie du résultat au bout d’une semaine de la dilution au dixième ci-dessous montre la formation de multiples colonies en particulier dans champs centraux moins susceptibles d’être contaminés par d’autres « microbes » de notre environnement :

Les encensements au centième et au millième n’ont pas permis la naissance de colonies. Une répétition des encensements avec un plan expérimental robuste serait sans doute souhaitable pour valider ce résultat. Ces quelques expériences semblent néanmoins montrer que, quand les dilutions ne sont pas trop importantes et donc quand le milieu de prédilection de ces microorganismes est suffisamment « riche », on peut mettre en évidence une prolifération, ce qui tend à prouver que l’hypothèse de microorganismes vivants, probablement des archées donc, est plausible.

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Une dernière recherche aurait été nécessaire pour caractériser nos « petites bêtes », à savoir une analyse génétique : ceci aurait permis une reconnaissance définitive de ces archées et de les situer avec précision dans cette branche du vivant. Nous n’avons à l’heure actuelle aucun moyen pour réaliser cela, mais il n’est pas impossible que cela le devienne dans quelques mois : la typologie sur la base du génome trouvé nous donnerait immanquablement une bonne idée non seulement du type de microorganismes que nous avons face à nous, mais aussi de leur origine, par déduction.

Conclusion

Si nous sommes bien en présence d’archées (voire de bactéries extrêmophiles), il semble raisonnable d’écarter a priori l’idée que ces archées sont apparues dans le vitriol, par génération spontanée en quelque sorte, à partir du processus décrit par Damer & Deamer et surtout en le poursuivant avec succès. Le processus décrit est probablement très long et s’est déroulé sur des durées qui relèvent de l’échelle géologique (de l’ordre du million d’années ou plus). Les scientifiques sont encore très loin d’y arriver et nous n’aurions pas la prétention de suggérer que les alchimistes le réalisent communément dans leurs laboratoires insalubres… En effet, une contamination des bains lors de la constitution des vitriols pendant de nombreux mois est trop probable pour que l’on suspecte une « création de novo » de ces proto-bactéries. Même avec cette seconde hypothèse, des questions importantes restent en suspens :

• D’où viennent-elles ? Sont-elles de même nature que les archées qui peuplent notre microbiote intestinal ? Si oui, comment ont-elles pu arriver dans les bains ? Par simple contamination directe ? Sinon, si elles ont une autre origine, sont-elles venues via les eaux de pluie en provenance de la haute atmosphère, via l’eau de Volvic utilisée (l’eau des volcans d’Auvergne charrierait-elle des microorganismes sommeillant dans les sédiments volcaniques ?) ou encore directement par transports dans les sulfates de fer ou de cuivre utilisés où elles seraient incluses ?

• La seconde question importante concerne leur éventuel rôle dans l’élaboration alchimique : même si elles sont depuis toujours restées invisibles, sont-elles indispensables dans certaines phases de l’œuvre ? Sont-elles les fameux « ferments » du compost sur lesquels Eugène Canseliet insistait lors de ses échanges avec Georges LLabrès ? Si c’est le cas, comment interagissent-elles avec la matière ? Peut-on penser, comme nous le suggérions dans un précédent article relatif aux « transmutations à basse énergie » de Kervran, que ces micro-organismes seraient capables de modifier fondamentalement le vitriol, comme la levure sans laquelle le pain ne peut monter ? Le terme de jardinier qualifiant l’alchimiste ne devient-il pas alors davantage qu’une métaphore ?

• Enfin, ces microorganismes primitifs, étonnamment résistants puisqu’ils constituent les premières formes de vie et perdurent depuis des milliards d’années, n’ont-ils pas une capacité toute particulière à attirer, à capter, voire à concentrer « l’énergie vitale ou spirituelle » dont parlent les alchimistes… (sans qu’on puisse dire exactement en quoi consiste cette « énergie ») ? Ne leur faut-il pas cette « énergie » en immense quantité pour survivre et proliférer dans des environnements infernaux ? C’est en tout cas ce que suggèrent les scientifiques : « Les mécanismes cellulaires qui préservent l’intégrité des macromolécules biologiques demandent beaucoup d’énergie aux cellules » (6). De ce fait, les archées de notre microbiote intestinal ne sont-elles pas nos principales centrales à énergie ?

Alors finissons avec un peu d’humour : si c’est le cas, ne pourrait-on imaginer que ces êtres prodigieux, principiels (principe, origine), auraient créé un jour la vie végétale puis animale nous compris, pour se constituer un rempart contre des conditions terrestres devenues dramatiquement douces et parcourir le monde bien à l’abri dans le confort douillet des acides gastriques ? On est bien peu de choses finalement !

ARQA éditions – K2Mars // Avec l’aimable autorisation de Aude Roche & Arnaud des Brunis © – Les amis de l’Alchimie & © « Les Chroniques de Mars » No 28, solstice d’Hiver 2018 – Numéro Spécial Alchimie.


NOTES

(1) Bruce Damer, David Deamer (2015) Coupled Phases and Combinatorial Selection in Fluctuating Hydrothermal Pools: A Scenario to Guide Experimental Approaches to the Origin of Cellular Life. Life, 872-87; doi:10.3390/life5010872.

(2) Gumerov VM et al. (2011) Complete genome sequence of « Vulcanisaetamoutnovskia » strain 768-28, a novel member of the hyperthermophiliccrenarchaeal genus Vulcanisaeta. J Bacteriol. 193(9): 2355-6. doi: 10.1128/JB.00237-11.

(3) Rubellus Petrinus. (2000) Le grand œuvre alchimique de Eyrénée Philalèthe, Nicolas Flamel & Basile Valentin. Arcades Editions : pp 108-10.

(4) M. le Comte de Buffon, Intendant du Jardin et du Cabinet du Roi, de l’Académie Françoise, de celle des Sciences, etc. (1783) HISTOIRE NATURELLE DES MINÉRAUX. Tome Second. A PARIS, DE L’IMPRIMERIE ROYALE : pp 171-90.

(5) Llabres Georges (2017) Pratique de la voie alchimique de Nicolas Flamel à Eugène Canceliet. Editions ARQA.

(6) FRANZETTI Bruno (2017) Microbes des environnements extrêmes.http://www.encyclopedie-environnement.org/vivant/extremophiles-microbes-environnements-extremes/


Annexes

Quelques sites internet pour se documenter sur les archées :

http://www.ecosociosystemes.fr/archaebacteries.html

http://genetique.snv.jussieu.fr/OLD%20SITE/Documents%202007/cours_Archaea_BMC_429_2007small6.pdf

http://planete.gaia.free.fr/microbio/archees/monde.archees.html

https://www.futura-sciences.com/planete/definitions/zoologie-extremophile-13599/

http://www.encyclopedie-environnement.org/vivant/extremophiles-microbes-environnements-extremes/

Serpentisation océanique et vie primitive – Marie-Laure PONS. ENS Lyon – Laboratoire de Géologie de Lyon, publié le 28-01-2014, site : http://planet-terre.ens-lyon.fr/

Les amis de l’Alchimie
http://alchimie.kruptos.com/


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ENTRETIEN avec Cédric MANNU // « Demain le FUTUR » – ou les dernières avancées de l’Énergie libre

TABLE RONDE avec // A. Roche, A. des Brunis, G. Llabrès, TEG – L’Alchimie face à la Science #1

TABLE RONDE avec // A. Roche, A. des Brunis, G. Llabrès, TEG // L’Alchimie face à la Science #2

A. Roche & A. des Brunis // L’ALCHIMIE & les Origines de la VIE – (Alchemy and life origin)

Roberto MONTI // L’Alchimie est une science expérimentale #3

Cédric MANNU // Le cas Nassim HARAMEIN # 1

Cédric MANNU // Le cas Nassim HARAMEIN # 2

Walter GROSSE // L’Alchimie et le troisième principe de la thermodynamique #3

ENTRETIEN avec Bernard CHAUVIÈRE // ALCHIMIE OPERATIVE –  » Le SECOND ŒUVRE « 

Bernard CHAUVIÈRE // RÉFLEXIONS HERMÉTIQUES #1

Bernard CHAUVIÈRE // RÉFLEXIONS HERMÉTIQUES #2

Georges LLABRÈS // Pratique de la Voie Alchimique – Le Triomphe du Phénix

Thierry E. GARNIER // ALCHIMIE – De l’art d’être disciple

François TROJANI // Alchimie & Hermétisme – Éternelle Rose-Croix

Les amis de Roger BOURGUIGNON // Roger BOURGUIGNON – Disciple d’Eugène Canseliet #1

Thierry E. GARNIER // Roger BOURGUIGNON – Disciple d’Eugène Canseliet #2

Jean ARTERO // Préface au livre Roger BOURGUIGNON – Disciple d’Eugène Canseliet #3

Franco BALDINI // Roger BOURGUIGNON – Disciple d’Eugène Canseliet #4

Robert DELVARRE // Roger BOURGUIGNON – Disciple d’Eugène Canseliet #5

Cédric MANNU // [Roger BOURGUIGNON – Disciple d’Eugène Canseliet #6

Bernard CHAUVIÈRE // Roger BOURGUIGNON – Disciple d’Eugène Canseliet #7

ARCHER // Roger BOURGUIGNON – Disciple d’Eugène Canseliet #8

Joëlle OLDENBOURG // Roger BOURGUIGNON – Disciple d’Eugène Canseliet #9

Dominique VOISIN // Roger BOURGUIGNON – Disciple d’Eugène Canseliet #10

Thierry MAZENOT // Roger BOURGUIGNON – Disciple d’Eugène Canseliet #11


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THESAVRVS // Adam – Adepte – Aigles – Alchimie – Alchimiste – Argyropée – Assation – Athanor – Chrysopée – Coupellation – Cyliani – Élixir- Élixir de longue vie – Eugène Canseliet – Philalèthe – Fulcanelli – Gnose – Grand Œuvre – Lavures – Macrocosme – Magnum Opus – Mercure – Microcosme – Nicolas Flamel – Œuvre au noir – Œuvre au blanc – Œuvre au rouge – Or – Panacée – Paracelse – Philosophie Hermétique – Pierre Philosophale – Poudre de projection – Régule – Rémore – Soufre – Sublimations – Table d’Emeraude – Teinture – Terre adamique – Transmutation – Unobtainium – Vitriol – voie de l’Antimoine – voie du Cinabre //

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